Dans cette chronique, nous revisitons les films « culte ». Qu’est-ce qui permet à un film de décrocher le statut de culte ? Et, surtout, est-ce toujours justifié aujourd’hui ? L’exercice est simple : on explore les critiques, on dissèque les éléments de style, et on se demande si le label « culte » est toujours valable aujourd’hui. Garanti avec sans mauvaise foi !
Volte/Face (Face Off, 1997) de John Woo, avec Nicholas Cage, John Travolta
Volte/Face est l’illustration parfaite du cinéma d’action des années 90, mais aussi de ses excès. La caricature est partout.
Dans les personnages tout d’abord : Nicolas Cage joue Castor Troy, un méchant tellement méchant qu’il se parodie lui-même. John Travolta incarne Sean Archer, l’agent du FBI qui est… eh bien, tellement gentil qu’il en devient aussi ridicule que son adversaire. Quant aux personnages secondaires, ils sont réduits à des clichés ambulants. Mention spéciale à la fille d’Archer, prototype de l’adolescente rebelle à deux dimensions, dont les dialogues oscillent entre absurdité et gênance. Exemple marquant : lorsqu’on la découvre (d’abord de dos pour l’effet dramatique) elle se révèle être gothique. A la question de son père « Qui es-tu censée être, une gothique ? », elle répond : « Je suis censée être moi. »
Le même traitement est réservé à l’action. Vous aimez les fusillades chorégraphiées avec un flingue dans chaque main ? Bonne nouvelle, vous en aurez pour votre argent. Glisser sur les ailes d’un avion, sauter d’un avion à la verticale, rouler par terre comme si c’était un sport olympique : Volte/Face coche toutes les cases des scènes d’action hyper-stylisées, et souvent sans raison.
La réalisation, elle, est saturée de ralentis. Il y en a dans quasiment toutes les scènes. Et s’ils étaient perçus comme « stylés » à l’époque, ils paraissent aujourd’hui désuets, voire ringards. De toute façon, dans 99 % des cas, le ralenti au cinéma est une boursouflure stylistique.
Mais ces choix esthétiques forcenés avaient peut-être une raison : forcer l’identification des personnages pour rendre crédible l’échange de visages.
Cependant, tout n’est pas à jeter. L’idée de départ est tout de même très bonne : l’échange de visages entre l’agent du FBI et son ennemi juré, implique aussi un échange d’identité morale. Ensuite, le twist narratif est novateur : l’enjeu du film change totalement au bout d’une heure. À mi-parcours, le méchant (qui a pris le visage du gentil) désamorce une bombe pour récolter les lauriers. Cette inversion des rôles redéfinit l’enjeu du film et le pousse dans une direction inattendue.
En somme, *Volte/Face* ressemble moins à un film qu’à une série en plusieurs actes. Une série, certes divertissante, mais caricaturale jusqu’à l’absurde.
Un film culte ?
En parcourant les critiques de l’époque (1997), une tendance se dégage : pour beaucoup, *Volte/Face* est le film culte de John Woo, celui qui a popularisé son style auprès du grand public. Mais la question persiste : pourquoi ce statut culte ?
En 1997, *Volte/Face* représentait l’apogée du cinéma d’action « bigger than life ». Avec ses tics de réalisation (ralentis, surjeu, poses iconiques), il incarnait parfaitement les excès des blockbusters des années 90. Mais ces mêmes éléments le rendent daté aujourd’hui.
Si l’on considère Woo comme un réalisateur culte, alors *Volte/Face* en devient le symbole. Ses obsessions visuelles et son amour des duels chorégraphiés trouvent ici leur apogée. Cependant, on pourrait aussi y voir un exercice de style poussif, une sorte de parodie involontaire de son propre cinéma.
Finalement, un « film culte » n’est pas nécessairement un « bon film ». Il peut être mal fini, caricatural, voire ringard, mais marquer par son audace ou sa capacité à capturer l’air du temps. En ce sens, *Volte/Face* est une capsule temporelle des années 90, avec ses défauts comme ses qualités.
Pour un spectateur contemporain, *Volte/Face* est à regarder comme une relique. C’est un film qui, malgré ses maladresses, reste fascinant dans sa volonté d’en faire toujours trop. Nicolas Cage et John Travolta livrent des performances délirantes, parfois à la limite du grotesque, mais parfaitement en phase avec l’esprit du projet.
Alors, culte ou pas culte ? Peut-être un peu des deux. *Volte/Face* est avant tout un divertissement spectaculaire, qui porte haut les couleurs d’un cinéma d’action exubérant aujourd’hui dépassé. Mais, malgré ses outrances, il continue de captiver – ne serait-ce que pour son audace folle et son refus de toute subtilité.
A moins, bien entendu, que John Woo ne soit un réalisateur totalement surcoté.
Alors, culte ou pas culte ? Peut-être un peu des deux. *Volte/Face* est avant tout un divertissement spectaculaire, qui porte haut les couleurs d’un cinéma d’action exubérant aujourd’hui dépassé. Mais, malgré ses outrances, il continue de captiver – ne serait-ce que pour son audace folle et son refus de toute subtilité.
A moins que John Woo ne soit un réalisateur totalement surcoté.